20 novembre 2018

GJ.


Un (long) message collectif pour mes contacts gilets jaunes :

J'aimerais me réjouir de voir les gens se bouger en masse : je sais que certain.e.s le font pour ce qui leur semble être de bonnes raisons, et que les (nombreux) actes homophobes, racistes, sexistes et j'en passe répertoriés depuis samedi sont peut-être le fait d'une minorité de celles et ceux que vous avez rejoint... (ne me faites pas le coup du "faut pas croire les médias", soyez gentils : un collègue de la radio où j'officie bénévolement s'est fait agresser verbalement et physiquement samedi parce qu'il suivait l'action menée à Besac. Pour rappel, Radio Bip est connue pour être une très vieille radio associative très engagée sur le front des inégalités et de la contestation sociale, depuis toujours. Mis à part des fachos, je vois pas qui pourrait avoir envie d'aller casser du journaleux de Bip. Ah tiens, le collègue est d'origine non-franco-française. Le malaise s'installe en moi, j'avoue.

Bon, j'essaie d'être optimiste malgré tout, malgré tous ces actes vraiment moches. C'est une question de moral en berne, je pense : car même si le mouvement dans son ensemble donne vraiment l'impression qu'il s'agit là du premier acte de contestation publique pour bon nombre d'entre vous (ce qui serait réjouissant, quelque part, "mieux vaut tard que jamais" etc), ce qui me flingue le moral depuis le début de cette histoire, c'est bien le motif de l'étincelle déclencheuse du truc. La goutte d'eau pour certain.es trop éloigné.es (pour plein de raisons, bonnes ou mauvaises, ça c'est encore un autre débat, ou plutôt une extension du même débat) des pourtant milliards de raisons de se retourner contre un pouvoir et un système (c'est un peu la même chose pour beaucoup) en place insupportable, inacceptable, odieux et destructeur à mille niveaux. Là-dessus, on est d'accord, et je crois qu'on est nombreux.

Alors voilà, en gros : ce samedi, un peu partout, il y a un appel à la Manifestation NousToutes contre les violences sexistes. Pour rappel et pour prendre un exemple parmi tant d'autres, tout proche de nous (si tu vis dans ma région en tout cas) une femme s'est fait égorger à Besançon tout récemment. Par son ex-mari, donc. Les flics étaient prévenus des menaces qu'elle avait reçu, la justice n'a pas réagi, bim, elle est morte : si le montant qu'on te fait raquer pour remplir ton réservoir te semble choquant au point d'aller affronter le froid sur des rond-points pendant des plombes, je me dis que peut-être, ce genre de trucs pourrait également te sembler une cause valable ? Hmm... Attends... je crois que je connais la réponse.

Sinon, en ce moment même se tient le Rassemblement journée internationale des droits de l'enfant. Là encore, c'est une raison de montrer qu'on est ensemble face à la connerie du monde qui nous entoure, je crois.

Et puis donc, en ce qui concerne l'article ci-dessous : des exemples dégueulasses de la conduite de certain.e.s gilets jaunes ces derniers jours, y'en a eu plein, donc. Le coup de la dénonciation du camion, là, c'est juste une grosse tâche dégueulasse sur votre gilet, par contre, et ça va être chaud pour la nettoyer.

Ne me faites pas le coup des "ça arrive les débordements, y'en a dans toutes les manifs" : c'est vrai, dans les grosses manifs de gauche assumées comme telles, ça arrive aussi, mais pas mal de manifestants veillent au grain et n'hésitent pas à prendre position et à virer les fachos qui s'incrustent en se disant que l'on est tous uni.e.s dans la contestation. Laisser faire les sacs à merde qui enlèvent leurs voiles à des meufs au volant, qui s'en prennent à des minorités au volant, c'est comme de dire que vous êtes donc okay là-dessus. Vous êtes okay là-dessus ?

Ne me faites pas non plus le coup du "ouais mais euh y'a des méchants casseurs dans les manifs habituelles, et puis les blackblocks aussi, tout ça, c'est des salauds aussi, ils pètent des trucs" : ça signifierait que casser du matériel et casser des vies humaines c'est une comparaison que vous pouvez donc faire, et ça explique donc pourquoi vous descendez dans la rue pour votre réservoir et pas quand des nanas se noient en passant illégalement la frontière parce que personne n'en a rien à foutre, quand bien même des réfugié.e.s ont tout perdu, quand bien même il y a de fortes chances que leurs vies soient toujours mille fois plus pourrave que celle d'un mec ou d'une meuf qui prend des journées pour aller bloquer une route.

Bref : les gilets jaunes, si vous avez besoin de renfort pour défendre votre cause, moi je veux bien venir parce qu'on a des combats en commun, visiblement. Mais pour avoir envie de vous rejoindre, va falloir faire un sacré ménage dans la hiérarchie de vos revendications, dans vos rangs, dans vos priorités et dans vos manières de faire.
Parce que pour le moment, il y a beaucoup trop de trucs qui sentent pas bon dans votre mouvement, de votre impulsion de départ aux procédés divers et variés.

ps :
"Pour ma part j'irais pas tremper l'orteil dans un mouvement qui permet ça, je continue de faire tourner (compulsivement) sur mon compte facebook tous les cas d’agression racistes et homophobes, pas pour conforter l’idée que tout gilet jaune est un facho en puissance et que ce mouvement est vraiment trop pourri, juste pour ne pas fermer les yeux sur ce qui est lié à un mouvement politique dont l'idée de départ est de droite (et pas apolitique), sous pretexte de faire feu de tout bois." (post emprunté à Eric Maldeteuté).
Ben voilà, pas mieux.

ps2 :
🏴

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