Quand je taffe au bureau (lire : chez moi, dans mon grand bureau de ministre dans la salle dédiée) (non), je taffe avec de la musique qui tourne et roule à côté, toujours.
Ça ne signifie pas pour autant que je l'écoute, et encore moins attentivement : il y a un temps pour écouter des disques, la musique nécessite ça (chez moi en tout cas) (je ne suis pas trop fait pour cette époque, en fait) et pour cela j'ai besoin d'être opérationnel (sinon, à quoi ça rime ?) ; mais ça n'est pas non plus un fond sonore insipide ou transparent : je ne peux pas écouter quelque chose qui ne me parle pas, qui ne résonne pas, sinon c'est inconfortable et pour le coup, c'est un effet hautement parasite.
C'est un entre deux. Ni fond sonore, ni écoute religieuse.
Bref.
Ce soir je taffais en piochant des disques dans l'étagère, sans regarder, et en m'imposant (enfin, presque : j'ai parfois triché, ça m'est arrivé plusieurs fois) de passer le disque choisi par le hasard et ma main gauche (l'étagère est à ma gauche).
Parfois le hasard (et ma main gauche) fait bien les choses, parfois un peu moins. Auquel cas, après 2 ou 3 morceaux, avant même d'arriver à la fin de la première face, en tout cas, j'interromps la lecture, non sans m'être imposé de finir au moins la piste en cours, comme si les musiciens étaient dans la même pièce et scrutaient mes gestes, les salauds invisibles et la culpabilité qu'ils communiquent, c'est quelque chose.
Ce soir, c'était un bon soir, j'ai écoute un disque que je n'avais pas écouté depuis dix ans au moins, tout juste un extrait ou un autre au détour d'un mix, par exemple.
Ce soir, donc : Tek 9, "It's Not What You Think It Is !!?!", initialement paru il y a exactement 29 ans sur SSR, quasiment jour par jour, dites donc. Ouais, 29 ans. Je le réécris parce qu'au fond de moi, rien n'accepte ni ne valide cette information.
J'ai notamment réécouté plusieurs fois le track "Gettin' Down Again".
Pourquoi ? Pourquoi pas.
Il n'a pas spécialement bien ou mal vieilli, il était juste là au bon moment.
Aux manettes derrière Tek 9, le gars Dego, ce génie anglais.
Il y a évidemment son duo 4Hero (une révolution musicale à eux deux, pas moins, même s'il fallait être londonien pour l'apprécier à sa juste valeur avant que la jungle ne déferle sur le reste de l'Europe), mais il y a tout le reste, et ça fait un paquet de trucs. Le londonien Dennis McFarlane n'est pas du genre à rien foutre, et puisqu'il produit pour quinze, il a au moins une quinzaine d'alias sous lesquels il se planque dans mes étagères ; je ne cite que les meilleurs ou du moins, ceux avec lesquels il a fait les meilleures choses à mes oreilles : Dego, donc, mais aussi Dollis Hill, Pavel Kostiuk, 2000Black, Da True B-Boy Descendant, Mr GoodGood...
Des années plus tard, Dego sortira un autre très bon album sous ce pseudo de Tek 9, "Simply", avec pléthore de super guests, et un son plus personnel que jamais, le cul coincé entre ses véléités hip hop et sa vibe broken beat. Wessslondon, baby !
Mais ce soir, c'est soirée "théma pseudo", puisque ce track précis a été coproduit par King Britt, qui lui aussi multiplie les identités au fil du temps. Britt qui était le dj de Digable Planets, groupe mythique s'il en est ; et ça n'est donc pas par hasard que sur ce même track on retrouve également Ishmael Butler, qui prend ici le blaze de Cheewa, mais qui est plus connu sous les pseudos de Butterfly ou d'Ish, soit le MC au timbre de voix si caractéristique.
"Ça me rappelle..." et merde, la vieillesse est un naufrage.
Ça me rappelle de super moments d'écoute entre copains, à la sortie de ces disques.
Les copains ne sont plus forcément tous dans le coin, pour toutes sortes de raisons, d'autres sont là, la musique reste.
Ni écoute religieuse, ni fond sonore. Juste une partie de la vie.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire